L'AVENIR DES TOMATES ... (8)
     
tomate marmande, photo michel ducruet 2008tomate marmande, photo michel ducruet 2008
 
Ducruet.2008.©
 
     

Les trois hommes tournaient le dos au soleil depuis quelques heures, ils avaient assez d'espace pour se déplacer de front la plupart du temps. Les feuilles bougeaient à peine, les oiseaux remuaient sans faire de bruit, le sol encore humide étouffait leurs pas... La lumière, nettoyée par l'orage des poussières en suspension, tapait avec précision sur les détails des couleurs et des contours, tout paraissait neuf et chargé d'énergies, la dernière des fleurs pétait la santé. Ils arrivèrent au bord dun cours d'eau tranquille, étrangement calme et transparent mais encombré de nénuphars et de quelques joncs près de la berge. Ils s'étaient avancés de quelques mètres loin du bord quand ils remarquèrent que cette "rivière" était bien trop rectiligne pour être sauvage. "C'est un canal, on devrait le suivre pour voir s'il nous mène à quelque chose d 'intéressant..." David prit vers l'Est sur ce qui paraissait être un vestige de chemin de halage ou de surveillance. Des bornes de granit dépassaient de la mousse à intervalles réguliers. A mesure qu'ils avançaient des grenouilles plongeaient sous les herbes aquatiques, des poissons filaient comme des fusées en laissant voir un reflet d'argent, un ou deux ragondins bondirent de touffes de joncs pour se jeter au fond. Après avoir passé deux énormes chênes ils durent s'arrêter net. Le canal butait contre une sorte de tunnel à demi obstrué par une porte massive en acier. Le temps et la rouille avaient travaillé . Un des vanteaux pendait sur un seul gond, l'autre ne valait pas mieux, l'eau se faufilait dans les brèches avec une légère accélération, sans faire de bruit. Le collier de métal grésillait plus fort et David entendit distinctement qu'il s'en échappait une mélodie , une sorte de marche lente qui ne ressemblait à rien de connu... La lumière bleue avait viré au rouge et clignotait en mesure. Ali se penchait. François leva les yeux et fit un signe de la main, une espèce de tour s'élevait un peu plus loin, cachée par les branches. "Ils sont passés là, je me rappelle ce qu'ils ont écrit dans le cahier... " Il y avait une rivière peu profonde qui s'enfonçait dans un tunnel... Une porte de fer à moitié tombée gardait l'entrée, nous sommes entrés et nous avons marché deux-mille pas jusqu'à un bassin ovale d'où partaient deux canaux en sens opposés... Nous avons pris celui de droite et nous avons aperçu le jour ." Je ne vous dis pas la suite , nous verrons bien." François marchait devant . Ils avaient des torches de pin entourées de chiffon et de résine. Les parois semblaient faites de la veille, c'étaient des blocs de granite rose posés sans mortier et presque lisses. Une maçonnerie de luxe pour un canal souterrain... Ils arrivèrent comme prévu au grand bassin ovale. Le collier de métal jouait un air de plus en plus précis. C'était une espèce de berceuse, une contine du genre boîte à musique, très jolie dans cet univers d'un autre monde. Ali reprit en sifflant la mélodie. François faisait des poum poum poum en mesure, la petite lumière suivait le rythme ... Quand ils franchirent le bassin, David voulut jeter un coup d'oeil sur la gauche mais il fut arrêté par une grille fermée et un bruit de cascade et de courant rapide. Ils se retrouvèrent dans le tunnel de droite. La petite lueur qu'ils avaient devant eux gagnait de l'espace et leur surprise fut énorme quand ils débouchèrent sous une immense verrière. Ils prirent un escalier sur le côté. C'était une cathédrale de verre, voûtée à trente mètres, incroyablement propre... "On dirait du cristal.." Ils se demandaient s'ils voyaient bien la même chose... Ils empruntèrent une allée bordée d'une rampe de pierre. D'autres allées se coupaient à angle droit couvertes d'un gravier rouge et noir. Entre ces allées des murs délimitaient des sortes de cubes surmontés d'un dôme transparent. Il n'y avait ni bruit ni quelque présence que ce soit.

David s'avança le premier dans un de ces cubes, une porte ouvrait sur un sentier rectiligne. de part et d'autre on ne voyait que de la terre. Une terre noire où rien ne poussait qui dégageait une odeur fraîche et attirante . Dans la main elle ne pesait pas plus lourd qu'un terreau ordinaire, mais on distinguait de très près de minuscules billes noires mélangées de petits cubes bleu-marine et de bâtonnets rouges. Cette substance avait l'air d'attendre, comme si des mains invisibles l'avaient préparée à quelque chose de très particulier... Ce qui frappait un oeil exercé, c'était l'absence d'insectes, de vers, micro-toiles d'araignées... " C'est un milieu stérile, pourtant prêt à transmettre de l'énergie... On dirait que tout a été conçu pour un cas très précis et trés déterminé de croissance végétale... " Ils allèrent plus loin dans d'autres cubes , c'était le même spectacle . Ali sans trop savoir pourquoi reprit de cette terre dans la main. Il fronça les sourcils, revint sur ses pas prit un autre échantillon. " Messieurs , voyez-moi ça, c'est une matière différente dans chaque cube. Les couleurs sont les mêmes, mais là par exemple les bâtonnets sont noirs et les billes sont rouges!..." Nous sommes dans un endroit assez sorcier, vous ne trouvez pas?"

     
     
     
     
     
     
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