LA MISE AU POINT
 
 

Je suis autodidacte. Un autodidacte différent de l'image d'épinal qui colle en France à ce genre d'individus. C'est une vérité plus vraie qu'un acte notarié : l'Ecole donne des droits, une espèce d'autorité, inspire confiance. Les diplômés de Sciences-Po ou des Beaux-arts se reconnaissent comme les augures qui pouffaient de rire en se croisant dans les ruelles de Rome. Voir le journal : " Troisième oeil "Janvier 2004.

Pourtant je ne manque de rien. Historien, géographe, historien d'art et archéologue de formation, entassant les livres et d'excellents maîtres, je ne me suis jamais ennuyé des études , à vrai dire elles se poursuivent... Par ailleurs j'ai eu la chance de rencontrer des personnes remarquables. C'est d'abord à la photographie que je le dois . Il y a vingt ou trente ans les appareils professionnels posaient des problèmes parce qu'ils étaient manuels, les tirages étaient rares et chers. Les écrivains, les peintres, avaient besoin d'images correctes et abordables... En ce qui concerne la Peinture, un peintre lyonnais, Jacques Decerle, voulait des photos et dans son atelier j'ai pressenti pour la première fois les forces de la Peinture. Quelques années passèrent. Un exil a fait le reste. Je me rappelle très exactement quand je suis allé chez Mme Richard, droguiste, pour quatre chassis 2F et dix tubes de couleur... J'habitais une pièce insupportable et j'avais décidé de changer le mur. C'était un jeu, comme de construire des châteaux de sable et de recommencer en se racontant de nouvelles histoires... Au tout début ce furent des exercices qui consistaient à organiser des poussées ... des ronds et des barres, des plans inclinés avec des boules qui montaient et descendaient à des vitesses contrôlées... Puis des clowns, des personnages de cirque, des groupes et petit à petit des figures féminines ou d'enfants... Pas de modèles... J'inventais au fur et à mesure des astuces et des raccourcis pour compenser mon ignorance totale du dessin académique... je lisais et relisais, j'allais voir les tableaux dans les musées.

Je suis donc naïf, mais avec une culture universitaire. Paradoxe?... Je ne crois pas que la Peinture serve à connaître ce monde ou doive le rendre intelligible... Elle en trouve d'autres...et ils attendent tranquillement que viennent s'y planter des hommes et des femmes. On se loge dans les tableaux, on ne s'y regarde pas. J'ai un faible pour les sujets les plus communs, les imageries primitives qui coupent l'herbe sous les pieds des bavards : trop de tête fait mourir. Je connais des philosophes qui se croient capables de romans policiers, des critiques qui passent trop tard à l'acte, des professeurs innombrables qui enseignent des vérités cancéreuses. La Peinture n'est pas le bouquet des universités ni l'ornement des poèmes. Tout ce que je vois du monde danse sur un gouffre. Le "Réel" comme disent les marchands de sable, c'est l'abîme... La société, le marché, Dieu le Fils, allah, iaweh, la crauté, l'injustice, les autres, le racisme, la poisse universelle, le sexe religion et autres fonds de commerce ne m'incitent qu'à des envies meurtrières." L'Art "pour parler comme les non artistes, c'est aujourd'hui l'affaire de quelques courageux travailleurs de l'import-export, et le terrain d'exercice des troisièmes couteaux du Pouvoir. Nous sommes entourés "d'artistes" du soir au matin et notre monde s'enseigne à lui-même plus que de raison. Malévitch, fort incompris, sut organiser de rudes aller-retours entre la surface peinte et les trous noirs du "Réel". Cela passait par des apparences . Il finit ses jours dans les aplats colorés de formidables pantins... Aux yeux du camarade Staline, c'étaient là des enfantillages, des peines perdues, des restes inutiles à l'homme nouveau... Les bonnes intentions et les bons sentiments nous tuent... allons au diable.

           
           
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