DESORDRES ...
 
 
amour de pierre et grande étable. photo michel ducruet
Ducruet..©.2009. Normandie.
 
  Rhyparographies. En juillet 1954, de la fenêtre d'un hôtel de Barcelone, j'ai jeté une dent de lait dans une cour intérieure. Je suppose qu'elle s'y trouve encore.

 Il y eut une mode à Rome et en Afrique où de grandes mosaïques représentaient des arêtes de poisson, des os de côtelettes et toute la multitude des restes des banquets, jusqu'aux tessons des plats échappés de mains sans forces...  De riches désoeuvrés s'offraient le luxe de piétiner des restes d'abondance. Cette provocation fut aux antipodes de nos vanités classiques où font signe des peaux de citron en spirales, des orfèvreries astiquées, des carafes de cristal d'où penchent des fleurs malades, d'inévitables têtes de mort et d'autres accessoires servant à se plaindre de ses plaisirs... Tempus fugit ... Les chrétiens du Nord posèrent des colliers précieux sur des livres mangés par les vers, des sabliers près de mâchoires escaladées par des limaces , un stradivarius aux cordes cassées sous la fumée des bougies étouffées, des bulles de savon près des miroirs... Ce luxe  de la pénitence, cousin de certaines nécrophilies sur des cadavres chauds, ne terrorisait personne dans ces Flandres et ces Pays-Bas où des couples en noir portaient des dentelles plus coûteuses que des maisons sur des satins plus riches en reflets que les coquillages. Le vernis des tableaux couvrait une matière nourrie à la thérébentine de Venise, aux huiles cuites à la litharge  par des alchimistes. Ces vanités brossées à la queue de martre, à l'essence d'aspic, sentaient la lavande et la cire d'abeille, comme les cabinets à tiroirs  qui leur tenaient compagnie... Nous y promenons toujours des yeux sans  larmes, confortés par l'aveu des plaisirs et trop avides pour nous attarder sur des chenilles, des pétales tombés ou des crânes lisses...  Une  perle posée près d'une dent d'ivoire nous tue le désespoir...

Car avec ou sans vertu, nous finirons dans la même poussière, emmenés par les vents avec les feuilles, nul n'étant soucieux de nos imperfections ou de nos prodiges. Quelques mensonges ou vérités que nous laissions derrière nous, qu'importe aux suiveurs, qui, comme Saint-Thomas, voudront tâter les plaies du monde en tenant de l'or d'une main et en  caressant des culs  de l'autre.




 
 
Le monde à l'école. photo michel ducruet.
Ducruet..©.2009. Normandie.
 
 
 
 
 
 
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