ENTRE BLANCS ET NOIRS ....
 
 
 
Ducruet.©
 

Le corps de la peinture est un plan interminable, apparemment fermé dans le carré, le rectangle , l'éllipse ou le cercle mais aussi sur l'épiderme d'un mur, d'une coupole, d'une caverne, de tout ce qu'on voudra. Dans une plage visuelle les yeux se déplacent tous les cinquantièmes de seconde et la mémoire, encore plus vite dans le filet de nos aventures accumulées depuis l'utérus, du flot des surprises, des stupéfactions, des cumuls de notre histoire. Nos forces consistent dans notre pouvoir de répartition des extrêmes et des intermédiaires dans l'espace dont nous sommes convenus. Notre corps est à l'image de ces limites : instrument de conscience et machine à vivre, source de plaisirs et douloureux in fine, notre propriété et son image... La peinture se fait donc en taule, comme se firent le "Devisement du monde" sous la dictée de Messire Polo, les Essais dans une tour et tant de livres chapîtrés dans les camps...

L'île déserte, l'exil après le naufrage, l'effacement de l'éducation et de la politique, effacement recherché ou né du hasard. Il faut s'habituer quelque part au pain sec et à l'eau, à la paille des cachots noirs dans les caves du bonheur... Renaître sur des jambes tordues, vidé d'une quantité de tripes... Soupçonneux de ce qui se passe, voyant les poisons dans les plats préparés, renonçant aux meurtres, à l'incendie des bonnes oeuvres, à la torture sadique des bovins et chiens du troupeau social, à la carrière de serial-killer en quelque sorte , pour se lier les mains au cerveau et aux yeux , se pencher sur du carton, de la toile, du bois... tracer des signes de l'âme, guetter sur les plages blanches, chercher en vain les plus petits indices d'une visite, d'un pas... craindre les cannibales en goguette, bâtir avec fièvre sa tanière, creuser des meurtrières pour se protéger des pirates seuls maîtres après Dieu sur les mers d'absurdité... Se mettre en oeuvre contre le temps contraint pour des rencontres vierges et d'imprévisibles amitiés... Car il faut la preuve qu'il y a de l'humain dans l'homme qui ne mérite pourtant que de crever son pesant de plumes au cul, rodomontades et faux papiers. Il y a de l'ami dans le chien. Du complice dans le malheureux. De la magie dans les yeux. De la couleur chez les fleurs, pourtant simples trucs à génération de graines ... Et du vent tant que la Terre tourne. La Peinture n'est pas l'Art : cet étron du social, cette pâtée pour psys, costards du dimanche, boucles d'oreilles et déodorants de facs... Faites les musées, vous y trouverez des femmes à profusion, perdues pour le sexe mais amatrices de reliques et amoureuses de saints, toujours prêtes à faire rempart de leur corps devant les tableaux, prêcheuses comme le Jean-Baptiste du Jourdain, annonceuses de messies et balances de jugement dernier... les veuves salivent sous la cravache du divin marché, des grands disparus et des exploiteurs de miracles. Pour ce motif les enfants du Capital et de Trotsky, siamois de la "Société", se plaisent aux méandres de la sociologie, comme les agneaux au bord des ondes pures, se désaltèrent de compliments pédagogiques, pressent les citrons de la lutte des classes ou vident les cabas de la ménagère... Car il faut que nos jeunes et nos vieux se mettent à table, bouffent du quotidien, du quart monde et du poil de fesses pour se mettre en selles, voir les choses en face: obscènes, en extase, en rébus géant, tisser la toile d'araignée des signes, logos, marques et affiches du bonheur de crever et du malheur de vivre. Les déchets parleront ainsi de l'âge d'or, les usines à gaz produiront de l'intelligence instantanée. Les mauvaises consciences s'apitoieront sur les bonnes. Ces enfants du Bon Dieu s'y connaissent en courtes élégances , clins d'oeil et lancers de pétards, fêtent l'esprit au carême dans leur monde de pénitence heureuse où la vertu consiste à ne faire de mal à personne en fermant les yeux sur l'enfance , l'amour et la mort, vieilles lunes invendables de l'anarchie.

La Peinture est donc à recommencer, sans souci du lendemain ni de l'amour d'autrui, aussi nécessaire que les pâtés de sables, indifférente aux marées, réductible au plaisir et croqueuse de morts. Game over.

 
 
 
 
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